Tendances

La BCV au rendez-vous du Saron

La BCV a mobilisé d’importantes ressources pour s’adapter à la prochaine disparition du Libor et au plein avènement du Saron. Cette expérience confirme la capacité de la Banque à mettre en œuvre des projets d’une grande complexité grâce à la qualité de la collaboration entre ses divisions.
| Par Nicolas Gay-Balmaz, BCV

Annoncé de longue date, le remplacement du Libor par le Saron doit intervenir au plus tard au 1er janvier 2022 (lire notre article «Adieu Libor, bonjour Saron», Convergences, juin 2019). Un changement important puisque le Saron servira, en Suisse, de nouveau taux de référence pour un grand nombre de produits, comme les crédits ou les instruments dérivés. La BCV sera à l’heure au rendez-vous. Elle a mobilisé des ressources conséquentes pour implémenter cette réforme. Les divisions Finance et risques (DFR), Gestion crédit (DIGEC), Entreprises (DIVEN), Asset Management & Trading (DAMT) et Services (DISE) ont été particulièrement mises à contribution.

Une formation pour s’approprier le Saron

Le fonctionnement du Saron fait partie de la culture bancaire et des connaissances nécessaires au soutien de l’offre de produits de la BCV. Pour cette raison, une formation dédiée sera dispensée en interne le mois prochain. Elle se déclinera sous deux modules. Le premier, destiné à toute la Banque, restera à un niveau d’explications général. Le second, destiné aux conseillers DIRE, DIVEN et DPB, abordera plus spécifiquement les aspects commerciaux liés au lancement de nos solutions en matière de crédits et de prêts hypothécaires Saron.

 
Chantier  

Des centaines de contrats passés à la loupe

Lionel Pittet, adjoint de division à la DIGEC.

La transition du Libor au Saron à la BCV a nécessité l’ouverture de quatre principaux chantiers d’ampleur inégale. Le premier est placé sous la responsabilité de l’adjoint du chef de la division DIGEC, initialement Massimiliano Cardillo, qui a ensuite transmis cette mission à Lionel Pittet. Ce chantier a concerné la revue des contrats commerciaux basés sur le Libor, essentiellement concentrés dans les départements des Grandes entreprises, du Trade Finance et des PME. Un travail d’inventaire, contrat par contrat, a permis d’identifier une centaine d’engagements de ce type, tantôt bilatéraux, tantôt syndiqués. Dans la foulée, le département Juridique a pu entrer en jeu afin de rédiger de nouvelles clauses faisant référence au Saron dans les contrats bilatéraux.

«Ce projet m'a permis de (re)découvrir différents domaines d'activité de la Banque et de rencontrer les personnes qui les animent.»

Pour les emprunts syndiqués où la BCV est sous-participante, des prises de contact et un suivi régulier avec les banques chefs de file ont été établis afin de s’assurer de la mise en conformité des contrats selon les nouveaux standards. Formellement lancée en novembre 2020, la revue des contrats a été accompagnée d’un travail d’explication auprès de la clientèle, en particulier sur le caractère impératif, mais neutre, de cette réforme dont les banques ne tirent aucun avantage spécifique. Une quarantaine de contrats, essentiellement syndiqués, doivent encore être finalisés d’ici la fin de l’année.

Pour cette revue des contrats, «l’avancement du projet ne dépend pas seulement de la qualité de notre collaboration interdivisions, mais de l’état de préparation des autres acteurs de la place financière, dont nous sommes souvent tributaires», souligne Lionel Pittet. Une interdépendance qui génère quelques lenteurs, mais qui ne remet pas en question la capacité de la BCV à faire face à ses engagements dans le respect du calendrier.

Chantier 

La migration des produits dérivés

Bernard Angeloz, responsable de projets à la Salle des marchés.

Le deuxième chantier, confié à Bernard Angeloz, a porté sur le basculement des produits dérivés du Libor au Saron. Dès la fin de l’an dernier, un travail d’identification des instruments adossés au Libor ayant des échéances postérieures à 2021 a été réalisé par la Salle des marchés. Très standardisés, les contrats d'échange de taux d'intérêt liant la BCV à des parties tierces ont ensuite pu être amendés en bloc pour introduire une clause faisant référence au Saron et à son mode de calcul. La migration du stock de produits dérivés vers les nouveaux indices de taux a commencé en début d’année. Elle se fait progressivement, contrepartie par contrepartie, pour éviter tout risque d’engorgement. L’objectif est de finaliser ces opérations début décembre.

«La mise en commun de compétences complémentaires de spécialistes clés (Front, Back, IT, Risques, etc.) a été primordiale et s'est effectuée dans un excellent esprit collaboratif.»

Chantier 

Nouvelle offre de produits Saron

Yves Petten, Product Manager à l'État-major DIVEN.

Le troisième chantier, pris en charge par Yves Petten, de l’État-major DIVEN, a trait à la construction d’une nouvelle gamme de produits Saron dans le domaine des prêts hypothécaires (PH) et des crédits commerciaux. Contrairement aux autres banques, la BCV n’est pas sous la pression de devoir migrer ses produits vers le Saron, son offre de «PH Court terme» et d’«Avance à terme fixe» n’étant pas indexée au Libor. L’éventail actuel de produits répondant déjà aux besoins de la clientèle et à la problématique de la fin du Libor, le lancement des «PH Saron» et des «ATF Saron» pourra donc se faire sans contrainte calendaire début décembre. Ces nouveaux instruments permettront à la BCV d’accroître sa visibilité sur les plateformes de comparaison des prix et de répondre de façon plus complète à des besoins spécifiques de la clientèle. Les «PH Court terme» et «Avance à terme fixe» seront maintenus, car ils présentent plusieurs avantages, notamment celui de pouvoir connaître au début de la période le montant des intérêts qui seront facturés à l’échéance, ce qui n’est pas possible avec des prêts adossés au Saron.

«Malgré un planning déjà chargé par des projets prévus de longue date, l’état d’esprit collaboratif et positif des entités concernées a permis de créer rapidement cette nouvelle offre de crédits Saron.»

Chantier 

Vaste chantier IT

Sébastien Rochet, responsable de projets IT à la DISE.

Enfin, la transition du Libor au Saron a requis plusieurs changements du système d’information, dont une partie importante de la gestion des crédits. Des quatre chantiers, ce dernier, dirigé par Sébastien Rochet avec le support de Thibaud Flammier, de la Trésorerie, s’est révélé le plus lourd. Le module d’Osiris utilisé pour la gestion des crédits commerciaux n’était pas capable de prendre en charge la complexité de la méthode de calcul du Saron. Plutôt que de procéder à des développements importants sur une technologie ancienne, décision a été prise de migrer les crédits liés au Saron sur K+TP, un système d’information plus récent utilisé pour les produits Devises (Forex, Dérivés Devises, Marché Monétaire) de la Salle des marchés. Ce transfert a nécessité un important travail de préparation en amont, compliqué par les contraintes liées à la crise sanitaire. Le projet a mobilisé beaucoup de développeurs, requis de nombreux tests dans les back offices et entraîné de profonds changements dans les habitudes de travail, notamment au sein de l’équipe «Saisie crédits» de Pierre Bornoz. La bascule vers K+TP a eu lieu début juin. Les problèmes rencontrés par plusieurs métiers à la suite de cette opération ont pu être résolus cet été, de sorte que ce chantier majeur peut être considéré comme achevé.

«Remplacer un système informatique de plus de 25 ans est toujours un challenge. Le réaliser dans un temps très court et 100% en TAD fut d'autant plus compliqué. Le succès est là après les quelques sueurs froides dues à la jeunesse du nouveau système.»