Portrait

Estelle Blanc-Paque, la durabilité comme compagne de route

Chamoniarde ayant étudié au Canada et à Milan, la spécialiste de l’investissement socialement responsable a posé ses valises en automne dernier à la BCV, dans un secteur pivot pour la transition vers une économie durable.
| Par Anne Gaudard, BCV

Décarbonation ou décarbonisation? Soudain, elle a un doute quant au mot à utiliser pour désigner ces mesures visant à réduire l’empreinte carbone d’une entreprise. Il est vrai qu’Estelle Blanc-Paque a parlé de développement durable et d’investissement socialement responsable dans plusieurs langues au cours de sa carrière. Engagée l’automne dernier pour occuper le poste de spécialiste ISR à la division Asset Management et Trading (DAMT), elle a très tôt pris la mesure de l’importance de cette dimension extrafinancière dans le monde de l’investissement – qu’il soit institutionnel ou privé.

Impossible de ne pas avoir conscience de la vitesse des bouleversements climatiques lorsque l’on grandit au pied du glacier du Tour. «Le glacier était là, proche de la maison, aujourd’hui, on ne le voit presque plus». La Chamoniarde, née en 1990, a découvert durant ses études le rôle central que les entreprises ont à jouer dans la préservation de notre environnement. Ainsi, après son bachelor en gestion des affaires à HEC Montréal, Estelle Blanc-Paque cherche une voie de master s’orientant vers la responsabilité sociale d’entreprise, connue aujourd’hui sous l’acronyme RSE. Les solutions sont peu nombreuses. Alors, pour mieux réfléchir encore, elle part sac à dos en Amérique latine et en Asie. Une expérience qui la conforte dans sa volonté d’être actrice du changement. Un changement inéluctable.

Les débuts de la RSE

À son retour, convaincue, elle bifurque vers Milan, où l’université Bocconi propose un master spécialisé en développement durable et gestion de l’énergie. L’offre en formation est encore faible au milieu des années 2010. Elle vit les premiers pas de l’enseignement en matière de responsabilité sociale des entreprises. «J’ai beaucoup appris en participant aux débuts de la RSE, nous avions une tâche immense, celle de consolider les bases». Elle noue aussi dans ce milieu international de personnes engagées des amitiés fortes. «Milan, c’est notre terre de cœur, là où nous nous retrouvons régulièrement depuis nos études».

Car, master en poche, elle se lance dans la vie active, une carrière qui commence à Paris. Elle travaille pour EY en tant que consultante et auditrice. Elle réalise des révisions dans l’information extrafinancière et des missions stratégiques dans le domaine du développement durable. Puis, il s’agit de développer pour le marché italien ce qui existe en France. Elle participe ainsi à la création d’une équipe «Changement climatique et durabilité» dédiée à la finance durable à Milan. Une ville qu’elle retrouve avec enthousiasme. Sa route croise immanquablement celle de la finance, qui a, elle aussi, un rôle clé à jouer dans la transition vers une économie durable.

Férue de montagne, de randonnée, de nature, attachée à sa région, elle s’en rapproche. Sa carrière passe par Genève et le World Economic Forum. «J’étais spécialiste des projets de décarbonation dans le secteur de la pétrochimie et de l’énergie des matériaux. Nous avons développé une initiative visant la collaboration entre l’industrie, les autorités publiques et le secteur financier pour accélérer leur transition vers une activité moins émettrice de CO2».

«Non seulement je trouvais que la Banque avait la taille idéale, mais en plus, elle est active sur un territoire qui me parle»

Engagement de terrain

Sa période «genevoise» lui a permis de resserrer les liens avec sa vallée. Elle s’engage d’ailleurs aussi sur le terrain. «Que ce soit le tourisme de masse, les transports ou l’évolution des glaciers, tout à Chamonix rappelle l’urgence d’agir». Elle participe ainsi à une campagne électorale pour les municipales autour de la liste «Chamonix s’engage». «L’expérience fut enrichissante, mais je ne suis pas sûre que je la réitérerais, car les campagnes sont rudes».

Au cours de ces années de recherche, elle cerne toujours davantage le rôle pivot de la finance dans le passage vers une économie plus durable. C’est forte de ce constat qu’elle opte pour une expérience à la BCV. Le développement de l’investissement socialement responsable lui permet de rapidement comprendre la Banque, de découvrir les équipes. «J’accompagne les métiers sur ce terrain, alors même que les différentes législations évoluent rapidement et que la pression des parties prenantes augmente».

Une région à découvrir

Elle a ainsi posé ses valises dans la région lausannoise. «Non seulement je trouvais que la Banque avait la taille idéale, mais en plus, elle est active sur un territoire qui me parle». Elle ne le cache pas, elle découvre vraiment la Suisse et sa culture «qui ne sont pas éloignées de Chamonix». Car, «lorsque je travaillais à Genève, j’évoluais dans un milieu très international et j’étais tout le temps à Chamonix.»

Estelle Blanc-Paque reste attachée à la Vallée de Chamonix, où elle a grandi.

L’acclimatation à la BCV s’est faite tambour battant. Son domaine, l’investissement responsable, gagne en effet en importance tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la Banque. Elle est ainsi chargée d’un projet d’intégration à l’envergure transversale qui lui a permis d’explorer de nombreux secteurs, départements et divisions de la Banque. «J’ai été surprise par l’environnement bienveillant, par la volonté exprimée de trouver des solutions, de chercher des compromis, par l’écoute rencontrée.» Et d’ajouter: «cette première impression ne m’a pas quittée.»

«Son» Mont-Blanc, désormais, elle le voit depuis sa maison de Prilly. Un chalet en madrier, dont la rénovation a bien occupé ses loisirs depuis le début de l’année. «Je vais profiter de l’été pour explorer les alentours».

Alors décarbonation ou décarbonisation? À la BCV, entretemps on a tranché, ce sera décarbonation, préféré à l’anglicisme décarbonisation. Il est vrai que désormais le mot est partout.