Témoignages

"Trois Mois chrono" aux Grandes entreprises

L’équipe dirigée par Philippe Obrist est parvenue à boucler un dossier de financement syndiqué particulièrement complexe entre septembre et décembre 2021. Le récit de Manuel Fluri, conseiller Grandes entreprises, qui aurait pu inspirer la série "24 Heures chrono".
| Par Anne Gaudard, BCV

Malaga. Son nom sent bon les vacances, mais le projet de financement ne fut vraiment pas de tout repos. Le dossier Malaga a demandé un engagement et un professionnalisme de tous les instants à l’équipe des Grandes entreprises – ainsi qu’aux autres services de la Banque engagés – pour qu’il puisse être conclu avant fin 2021. Un chiffre peut résumer cette course contre la montre particulière pour le département, lancée en septembre: 700. Soit le nombre d’e-mails que Manuel Fluri, conseiller aux Grandes entreprises, a échangés avec les intervenants de ce projet de financement syndiqué pour une société cotée, en l’occurrence le groupe Kudelski. Un scénario à la 24 Heures chrono.

«Ce fut intensif, intéressant et instructif tant pour moi que pour la Banque», raconte Manuel Fluri en se remémorant à la minute près le déroulé des dernières heures avant la libération des fonds. Si ce n’est pas la première fois que la BCV endossait le rôle de chef de file dans un financement à plusieurs concernant une multinationale (lire interview de Philippe Obrist), Malaga comprenait certaines particularités et contraintes qui l’ont rendu exemplaire.

Délai serré et confidentialité

Malaga concernait tout d’abord une société cotée, ce qui implique des exigences spécifiques en matière de communication. La Banque a coordonné les flux d’informations à l’interne, mais aussi avec les autres prêteurs engagés dans le financement ainsi qu’avec un cabinet d’avocats. Cette transaction concernait par ailleurs des faits considérés comme ayant une action potentielle sur le cours des titres de l’entreprise. Inutile dès lors de souligner l’importance des échanges sécurisés et de la gestion des accès aux dossiers. «Le nombre d’intervenants a dû être limité et le périmètre de confidentialité a dû évoluer au gré de l’avancement des travaux. À la BCV, une dizaine de collaborateurs et collaboratrices sont intervenus régulièrement – juridique, crédit, compliance, informatique, etc. –, d’autres ponctuellement. Au final, une trentaine de personnes ont dû signer un document de confidentialité», raconte Manuel Fluri.

Manuel Fluri, conseiller Grandes entreprises, et Philippe Obrist, chef du département Grandes entreprises, disent avoir beaucoup appris de ce projet particulier.

Entre Lausanne et Phoenix

Ce travail de coordination a été complexifié par le fait que le dossier devait être conclu avant le 31 décembre. «Nous avons eu environ trois mois pour trouver une solution satisfaisant l’ensemble des parties prenantes, la concrétiser dans les moindres détails afin que l’argent parvienne sur les comptes de l’entreprise avant la fin de l’année», résume le conseiller. Et de considérer, avec le recul, que cette «pression du chronomètre a aussi été un avantage pour trouver une solution en nous imposant une approche pragmatique». Le tout a par ailleurs été pimenté par la localisation des personnes en contact: certaines sur les bords du Léman, d’autres à Phoenix, Arizona, où la société de Cheseaux-sur-Lausanne a également son siège et une partie de ses activités. «Nous avons dû jongler avec huit, voire neuf heures de décalage horaire et l’accès à distance s’est avéré être une aide précieuse.» 

Outre les différentes parties prenantes – actionnaires, groupe Kudelski, etc. –, le dossier en lui-même a concerné des personnes physiques et morales en Suisse et à l'étranger. Autant d’accords à trouver et de signatures à récolter. «Tout ne dépendait finalement pas uniquement de nous, nous ne pouvions avoir de prise sur certains chapitres du dossier, et ceci alors que l’on était en pleine vague de COVID-19», se souvient Manuel Fluri.

Alors que d’autres dossiers ont, depuis, pris place sur son bureau, il se souvient avec satisfaction de ces trois mois intenses. «Nous avons beaucoup appris, que ce soit en matière de processus ou de gestion des plannings. Ces dossiers de structuration financière complexe demandent une coopération toujours plus fine avec le front, le compliance, l’analyse crédit, le juridique, la salle des marchés, etc.». Il ajoute que sur le plan humain également l’expérience s’est révélée passionnante. «Tout le monde a tiré à la même corde. Nous avons approfondi nos relations avec d’autres entités de la Banque et mesuré l’importance des contacts directs, surtout lorsque le timing est si serré». Et de conclure: «c’est impressionnant toutes les compétences que nous avons à l’interne».

Au final, le groupe Kudelski a pu annoncer le 23 décembre 2021 dans un communiqué répondant à l’article 53 du Règlement de cotation de la Bourse suisse concernant la publicité événementielle, «la vente et la cession-bail de ses immeubles de Cheseaux». Et la levée de montants très importants. Mission accomplie.

«Ce type de dossier correspond pleinement aux axes de développement des Grandes entreprises»

 
En quoi ce dossier était-il si spécifique?

Philippe Obrist, chef du département Grandes entreprises: Dans ce genre de dossier, se lancer en septembre pour une conclusion au plus tard le 31 décembre revient à commencer à 23h55 une tâche devant être impérativement terminée à minuit. Toutefois, l’aspect timing n’était pas la seule spécificité de cette opération. Outre le fait de traiter avec une société cotée en bourse dans un délai extrêmement court, la problématique de la transaction était intéressante pour nous; elle nous a permis de démontrer notre savoir-faire.

Quels ont été les atouts de la Banque?

Notre bonne connaissance du canton, de ses acteurs économiques et institutionnels, nos relations historiques avec l’entreprise, tout comme les compétences internes dans la structuration de crédits nous ont permis de faire la différence par rapport à nos compétiteurs. Nous avons ainsi pu trouver une solution sur mesure qui a satisfait l’ensemble des parties prenantes, dont les intérêts étaient souvent divergents. Le groupe Kudelski correspond au profil d’entreprises avec qui nous souhaitons travailler: une société d’une importance majeure, active à l’international avec un fort ancrage local. L’affaire en question correspondait par ailleurs à la taille de crédit et au profil de risques que nous pouvons traiter. Nous avons les atouts pour être compétitifs dans cette niche.

Pourquoi le dossier Malaga est-il important pour votre département?

Nous avons déjà endossé le rôle de chef de file dans des financements syndiqués, mais celui-là comprenait des spécificités qui pourront nous servir à l’avenir. Nous avons une carte à jouer dans les financements complexes sur mesure pour les grandes entreprises situées dans le canton de Vaud, voire en Suisse romande. Que ce soit en tant que participant à des crédits syndiqués, en tant que chef de file pour une catégorie spécifique de clientèle, dont la localisation et la taille correspondent à la nôtre, ou en ce qui concerne les transmissions d’entreprises. Le financement complexe sur mesure constitue une des quatre initiatives commerciales stratégiques qui doit nous permettre de continuer de croître au rythme du marché tout en soignant notre profil de risques modéré et l’allocation de nos fonds propres. Nous sommes une petite équipe dotée des compétences d’une banque universelle. Ce dossier a permis de démontrer que nous pouvions agir rapidement tout en faisant preuve d’agilité, de professionnalisme et de précision.

Malaga, est-ce aussi un exemple des atouts du cross-selling?

Évidemment. Sans les échanges avec les autres divisions, jamais nous n’aurions pu mener à bien ce projet. Par ailleurs, Malaga permet à plusieurs autres entités de la Banque de réaliser des affaires. Nous avons ensuite partagé notre expérience lors d’un lunch learning pour mieux apprendre.

"Nous avons une carte à jouer dans les financements complexes sur mesure pour les grandes entreprises situées dans le canton de Vaud, voire en Suisse romande", souligne Philippe Obrist.